Le syndicat en ce qu’il a pour mission légale de défendre l’intérêt collectif de la profession peut avoir à agir en Justice dès lors qu’un salarié est victime d’une violation du droit du travail. Dans cette optique, il peut agir à ses côtés et défendre le point de vue et l’argumentation du salarié.
Mais il peut aussi faire valoir, qu’au-delà du salarié, la violation du Code du travail invoquée et démontrée par le salarié cause un préjudice à l’ensemble de la profession.
Dans ce cas, le syndicat sera une partie à part entière lors du procès et aura à prouver l’atteinte aux intérêts collectifs de la profession.
Aussi, généralement cette demande est introduite en même temps que celle du salarié puisque c’est le syndicat qui a pu l’accompagner dans sa démarche. Néanmoins, il arrive que certains salariés agissent seul, sans en avertir leur syndicat.
Dans ce cas, si le syndicat n’a pas pu introduire une demande à l’ouverture de l’affaire, il pourra le faire au cours de la procédure. On parle alors d’intervention volontaire du syndicat.
Celle-ci peut être à titre accessoire, c’est-à-dire dans le seul but d’appuyer par des éléments propres ou identiques à ceux présentés par le salarié, la prétention de ce dernier.
L’intervention volontaire peut aussi être principale dans la mesure où le syndicat va ajouter une demande nouvelle à celles qui ont déjà été présentées par le salarié.
L’intervention volontaire recoupe donc l’hypothèse évoquée précédemment où le syndicat va demander la réparation d’un préjudice causé à l’intérêt collectif de la profession et c’est l’hypothèse la plus intéressante que nous étudierons.
A cet égard, il faut noter que le syndicat peut intervenir dans une affaire à tout moment de la procédure et donc, en principe, jusqu’à la clôture des débats qui intervient à l’issue des plaidoiries.
Aucune formalité particulière ne peut être exigée eu égard au caractère oral de la procédure. Autrement dit, une simple prise de parole du représentant du syndicat en début d’audience ou après que le salarié ait exposé sa cause lors du bureau de jugement suffit normalement pour que le syndicat devienne partie au litige.
Néanmoins, il faut, au préalable, s’assurer du respect de certaines conditions posées par le Code de procédure civile pour que le juge ne vienne pas à juger irrecevable l’intervention volontaire du syndicat.
Ainsi, il est nécessaire que la demande du syndicat se rattache de manière suffisante aux prétentions soulevées par le salarié (Art.
325, CPC), et qu’il justifie d’un droit d’agir relativement à la prétention qu’il élève (art. 329, al. 2, CPC), c’est-à-dire qu’il justifie d’un intérêt et d’une qualité à agir.
- a) L’existence d’un lien suffisant. Cette exigence vise à s’assurer que les demandes qui seront formulées par le syndicat soit sans rapport avec l’affaire soumise au Tribunal.
Ainsi, il faut mais il suffit que les demandes du syndicat et celle du salarié présentent des similitudes ou qu’elles portent sur le même droit.
Il en est assurément ainsi quand le syndicat se base sur la violation des dispositions du Code du travail qui sont elles aussi invoquées par le salarié.
- b) Qualité à agir. Cette condition peut poser problème à certains groupements (notamment pour les associations) mais pour les syndicats, la loi leur a confié cette qualité. Il résulte en effet de l’article L.2132-3 du Code du travail que les syndicats professionnels peuvent « exercer [en justice] tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent. »
- c) Intérêt à agir. Pour agir en justice, il faut nécessairement en avoir intérêt. C’est la condition la plus rigoureuse de l’intervention volontaire du syndicat étant donné qu’elle nécessite une appréciation et une justification casuistique. En tout état de cause, notons que, principalement, cet intérêt à agir va naître, pour le syndicat, lorsque l’intérêt collectif de la profession est en cause.
Il reste alors, pour le syndicat, à déterminer si l’action individuelle du salarié cause, en outre, un préjudice distinct que celui que subit le salarié, à savoir un préjudice à l’intérêt collectif qu’il représente.
Rappelons à cet égard que la notion d’« l’intérêt collectif » de la profession est assez vague pour s’appliquer en de nombreux domaines.
Mais à chaque fois que le syndicat voudra intervenir et demander des dommages et intérêts en raison du préjudice cause à cet intérêt collectif, il devra le prouver.
Cet intérêt sera très certainement reçu dés lors que le syndicat démontre qu’au travers de la violation du Code du travail en cause, c’est une violation du droit applicable à tous les salariés qui cause nécessairement un préjudice à l’ensemble de la profession dans la mesure où ce droit est une protection pour les salariés.
C’est à coup de condamnations individuelles que sera plus globalement respecter le droit du travail dans la profession.
Ainsi, comme on peut le sentir au travers de ce raisonnement, très peu de domaines semblent exclus. Néanmoins, il faut noter qu’il y a encore quelques exceptions qui semblent toujours freiner l’action en défense de l’intérêt collectif de la profession : les atteintes à la vie privée du salarié et les illégalités commises dans la gestion économique (abus de biens sociaux notamment).
En résumé, pour se porter partie intervenante dans le litige individuel d’un salarié avec son employeur, le syndicat doit, au préalable, avoir en tête les arguments pour répondre aux conditions de recevabilité de l’intervention volontaire que sont un lien suffisant entre les demandes du salarié et les demandes du syndicat, une qualité à agir et un intérêt à agir.
Il faut aussi ne pas oublier que le syndicat, étant une personne morale, doit mandater une personne pour le représenter en justice (dans une affaire si le syndicat connaît l’affaire ou alors dans toutes les procédures où il serait porté atteinte à l’intérêt collectif de la profession que le syndicat représente).
A cet égard, il est important de vérifier quel est l’organe du syndicat pouvant donner ce mandat et le signer, pour bien s’y conformer. Ce respect des dispositions statutaires pourrait, en effet, être vérifié par un juge un peu tatillon.
C’est pourquoi, il est conseillé que le représentant du syndicat se présente à l’audience avec un exemplaire des statuts du syndicat, la délibération de l’organe habilité à donner mandat et bien sûr, l’exemplaire du mandat accompagné d’une pièce d’identité.